Le 22 avril 2023, cinq prêtres martyrs de la commune en 1871 ont été béatifiés à Paris, en l’église Saint-Sulpice : les abbés Henri Planchat, Ladislas Radigue, Polycarpe Tuffier, Marcellin Rouchouze et Frézal Tardieu.
La brève aventure révolutionnaire de la Commune s’est achevée dans un bain de sang, avec environ 15.000 morts. Les cinq prêtres béatifiés le 22 avril 2023 avaient été retenus prisonniers plusieurs semaines par les communards. Une trentaine de gendarmes et quatre « mouchards » supposés ont également été exécutés le 26 mai 1871.
En novembre 2021, le Vatican a reconnu le « martyre » de ces ecclésiastiques – car ils sont « morts en haine de la foi » –, ouvrant la voie à leur béatification.
Cinq prêtes bienheureux
L’abbé Henri Planchat naît en 1823 dans une famille aisée et choisit de s’engager, peu après son entrée au séminaire, auprès des plus pauvres, dans le quartier parisien de Grenelle. Surnommé « l’apôtre des faubourgs », sa cause de béatification a été introduite dès 1896, mais a été freinée au XXe siècle avant d’être relancée dans les années 1990.
« Il a tout quitté pour vivre avec et comme les pauvres »
« Le père Planchat est l’image du prêtre comme en parle le pape François. Né dans un milieu favorisé, il a tout quitté pour vivre avec et comme les pauvres », expliquait en juin à La Croix le postulateur de la cause, le père Yvon Sabourin. « Comme le Christ, il a versé son sang injustement mais sans jamais condamner ses agresseurs. » Fin mai, une procession célébrant la mémoire des religieux assassinés avait été prise à partie, à Paris, provoquant un dépôt de plainte du diocèse.
Ladislas Radigue – né Armand Radigue, également en 1823 –, originaire de Normandie, fut notamment le maître des novices des picpuciens avant de devenir prieur. Au tout début des événements de la Commune, il demanda à la plupart des religieux habitant avec lui de quitter Paris, et y demeura avec quelques membres de la congrégation.
Né Jules Tuffier en 1807, Polycarpe Tuffier vit le jour en Lozère. Il fut ordonné prêtre juste avant la révolution de 1830. Envoyé près de Rouen comme aumônier des sourds et supérieur de collège, il devient en 1863 procureur de la Maison principale des picpuciens.
Marcellin Rouchouze (Jean-Marie) naît en 1810, à Saint-Julien-en-Jarez, dans la Loire. Il fut ordonné prêtre à 42 ans, après avoir visité le curé d’Ars. Appelé en 1865 aux fonctions de secrétaire général de sa congrégation, il fut arrêté le 12 avril 1871.
Né en Lozère en 1814, le Père Frézial Tardieu entra chez les religieux de Picpus en 1837. Particulièrement investi dans l’éducation, il est décrit comme un homme humble et aimé de ses élèves.
Une demande vieille de 127 ans
Le cardinal Marcello Semeraro, représentant du pape François, a évoqué « une histoire complexe » et appelé à prier pour tous les morts de la Commune.
Une lettre du pape François, qui a accédé en mars 2023 à une demande vieille de cent vingt-sept ans de béatifier les cinq religieux, a été lue pendant la messe.
Dans sa missive, le chef de l’Eglise catholique a demandé que ces hommes « puissent désormais être appelés bienheureux et être célébrés chaque année le 26 mai ».
En novembre 2021, le Vatican a reconnu le « martyre » de ces ecclésiastiques – car ils sont « morts en haine de la foi » –, ouvrant la voie à leur béatification.
Un régime hostile à l’Église
La Commune avait des implications antireligieuses évidentes: pour surmonter l’ancien régime et promouvoir de nouvelles formes d’organisation de la société, certains Communards considéraient la religion chrétienne et ses représentants comme un obstacle à éliminer.
Ces serviteurs de Dieu ont été arrêtés simplement parce qu’ils étaient prêtres. Le critère de «haine de la foi», nécessaire pour la reconnaissance formelle du martyre, est également confirmé par la férocité perpétrée contre les religieux par la foule en colère et le pillage des lieux et du mobilier servant au culte. Dans la Maison Mère de la Congrégation des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, les espèces eucharistiques et les objets sacrés ont été profanés.
Les Serviteurs de Dieu étaient conscients des risques qu’ils couraient. Ils auraient pu quitter Paris, mais ont préféré rester et exercer leur service ministériel. Par exemple, le futur bienheureux Henri Planchat, averti de la possibilité d’une arrestation, est resté à son poste pour confesser les fidèles en vue de Pâques. Pendant leur emprisonnement, les serviteurs de Dieu ont prié et confessé les autres prisonniers.
La renommée de leur martyre et des signes s’est répandue immédiatement après leur assassinat et s’est poursuivie au fil des ans jusqu’à nos jours.